Idéal physique féminin, gay et travesti au Brésil ou nouvel esthétisme du corps technologique ?

Mots-clés : Brésil, Etats-Unis, technoculture, idéaux de beauté, identité sexuelle et de genre, stéréotypes, Barbie, Xuxa.

by Natasha Prevost

Au Brésil, la ville de Rio de Janeiro et de Sao Paulo sont aujourd’hui reconnues comme des destinations de prédilection pour la chirurgie plastique. Le corps esthétique est un produit manufacturé, plastique et technologique. Le corps n’est plus qu’une structure biologique mais aussi un amalgame d’idées, d’images, de projections et de représentations commercialisées. Le corps d’origine est devenu un territoire en jachère sur lequel il est possible de modeler, moduler à souhait. Les individus ayant embrassés cette technoculture sont entrées dans un univers inorganique et/ou de consommation. Des femmes et des hommes désirent un corps plastique dans le but de correspondent aux idéaux de beauté véhiculés par l’occident et réinterprété localement. La négociation entre le corps original et plastique se fait par l’intermédiaire d’images digitales, modifiées. Les bases de la perception ont changés. Il devient de plus en plus difficile de faire la différence entre l’original et la copie. La nouvelle donne est la transformation, la cyborg(y)fication du corps.

Certaines figures des médias de masse se distinguent comme idéaux de beauté. Ce n’est pas seulement le corps plastique qui parle mais tout un système idéologique impérialiste et patriarcale. L’économie mondiale est extrêmement inégalitaire, les sièges sociaux de la majorité des compagnies multinationales sont basés aux Etats-Unis, en Europe et au Japon. La société mondiale moderne est, comme l’a démontré Wallerstein (1974), le produit historique de l’expansion politique et économique des États européens depuis le quinzième siècle, et de la création des empires coloniaux.
Les vies prises dans une situation locale sont aujourd’hui (et le sont depuis longtemps) très fortement influencées par les luttes géopolitiques, les marchés mondiaux, les compagnies commerciales multinationales, les migrations de main d’œuvre, les médias transnationaux (Connell, 2000, 200).

De quelles façons les médias de masse nord-américains et brésiliens influencent-ils la représentation du corps féminin et masculin en milieu urbain au Brésil? Qu’elles sont les conséquences pratiques à l’intérieur de la société brésilienne métropolitaine? Qu’est-ce que le corps homosexuel? Qu’est-ce que le corps féminin? Il y a l’image et il y a la construction d’une identité : la femme fatale, objet, infantile, professionnelle, mère, monstre, victime; l’homosexuel épidémique, plastique, féminin, virile, victime; le travesti meurtrier, fétichiste, entertainer, victime. De quelles façons, l’identité de genre, les sexualités, les désirs, les phantasmes sont-ils diffusés? Comment l’identité de genre bipolaire est-elle renforcée et non déconstruite? Des valeurs, des qualités, des défauts, des comportements (sur)réalistes sont présentés comme intrinsèques, ontologiques à la sous-culture visée. De quelles façons ces idées sont-elles transmises très tôt aux nouvelles générations? Désuétude du système bipolaire, collision entre fiction patriarcale et réalités diverses.

Construction sociale patriarcale de l’identité de genre au Brésil
La construction sociale de l’identité sexuelle et de genre se façonne et se refaçonne à l’intérieur d’une trajectoire historique, économique, politique, culturelle et raciale. La construction de l’image idéale de l’homme et la femme brésilienne est aujourd’hui influencée par les médias de masse nord américain et européen. Si la majorité des foyers brésiliens possèdent un téléviseur, les changements, les nouvelles tendances sont produites et mises en marché dans les grandes métropoles en premier. La majorité des immigrants sont natifs du nord-est du pays et ont la peau plus foncée que les gens du sud. De façon générale, les immigrants pauvres du nord-est forment la main-d’œuvre la plus exploitée à l’intérieur de l’économie métropolitaine. La ville de Rio de Janeiro et de Sao Paulo, sont considérées comme plus progressistes au niveau des valeurs véhiculées par rapport à l’identité de genre et de l’orientation sexuelle. Au niveau de la géographie urbaine, on ne retrouve pas à proprement parler de ghetto gay. Certaines rues sont reconnues comme ‘gay’ parce que la majorité de bars et des restaurants attirent une clientèle homosexuelle. Cette qualité progressiste va de pair avec un taux de violence et d’homicides des plus élevés au monde.
Ces relocalisations des corps créent la possibilité d’une hybridation dans l’imagerie du genre, la sexualité et d’autres formes de pratique. Cependant, le mouvement ne tend pas toujours vers la synthèse et les hiérarchies raciales/ethniques du colonialisme ont été recréées dans de nouveaux contextes, y compris dans la politique métropolitaine (Connell, 2000 :205-206).

Ces nouveaux contextes sont sous l’égide et l’influence des grands de se monde : l’homme occidental, blanc et hétérosexuel. L’imagerie du genre et de la sexualité sont issus de l’imaginaire, des phantasmes de ces derniers et entre en circulation présentée comme idéal. Comme le souligne Connell (2000), le programme néo-libéral de réforme des économies nationales et internationales implique un verrouillage des possibilités historiques de réforme du genre. Au nom des ‘libertés individuelles’, de la compétitivité mondiale, les discussions de réforme des rôles sexués, les dispositions anti-discriminatoires sont relayées aux oubliettes et restaurent du fait même la magnanimité patriarcale.

À l’intérieur de cette article, la chirurgie esthétique est définie comme le choix conscient d’individus qui désirent modifier leur corps de façon à correspondent à l’idéal imaginé et transmis par les médias de masse du corps de la femme et de l’homme. Les personnes interviewées appartiennent à des sous-cultures périphériques à la culture dominante. Au Brésil, les sous-cultures gay et travestis sont séparées par un ensemble de valeurs et de comportements qui diffèrent d’un groupe à l’autre. Les entrevues ont été réalisées avec des hommes appartenant à ce milieu social. De même que des entrevues ont été réalisées avec des femmes hétérosexuelles. La diversité sexuelle ne se limite évidemment pas à ces trois ‘catégories’. Par contre, la chirurgie esthétique touche de plus près ces trois sous-cultures.

J’explorerai deux icônes de la beauté et les valeurs hétérosexistes qu’ils véhiculent : la célèbre star de la télévision brésilienne, Xuxa et la poupée la plus vendue de par le monde, Barbie. Dans un deuxième temps, de quelle façon l’imagerie du corps homosexuel, est tributaire de la société patriarcale. Et finalement, comment l’idéologie patriarcale continue d’être légitimée à travers la diffusion de commerciaux de jouets pour enfants. Ces exemples font partie de l’imagerie des médias de masse présentés à des fins commerciales, politiques et sexuelles. L’objectif de cet article est de démontrer que les identités de genre et sexuelles sont commercialisées de façon à renforcer les valeurs patriarcales. Les images digitales et autres techniques permettant de modifier une image permettent une ouverture vers un esthétique corporel plastique. Le corps peu aussi être modifié. Cette ouverture a tout de suite été investi par des valeurs masculines et féminines antagonistes.

Barbie et Xuxa : construction sociale de l’idéal de beauté occidental
Tout comme Barbie Millicent Roberts de Mattel, Maria da Graça Meneghel, universellement connue comme Xuxa a un mythe d’origine conflictuel. Dans le cas de Barbie, on parle de la mère dévouée qui voulait offrir à sa fille une nouvelle poupée tridimensionnelle. L’inventeur qui a aussi travailler à la confection de missiles et qui s’est ensuite marié avec Zsa Zsa Gabor. Les entrepreneurs qui ont vu dans une poupée allemande sexe symbole pour les adultes une façon de mettre en marché une poupée pour les enfants. Dans le cas de Xuxa, les différents mythes tournent autour du conte de fée. Sa célébrité et sa fortune présentes se base sur la chance d’avoir été remarquée à seize marchant sur la plage par un homme travaillant pour les publications Bloch, une des plus grandes maisons d’édition et de distribution du Brésil. Les origines provinciales de Xuxa, née dans la petite ville de Santa Rosa située dans le sud du pays dans l’État de Rio Grande do Sul sont constamment mises de l’avant. Le tour de force réalisé à travers la présentation du mythe d’origine de Xuxa touche à plusieurs aspects problématiques de la culture brésilienne. Sa présentation contribue à légitimer l’image de Xuxa de façon à rejoindre toute les classes sociales du pays et bien au-delà. Xuxa est fille d’un militaire et est issue de la classe moyenne-basse brésilienne. Tout comme une grande partie de la population brésilienne, particulièrement du Nord-Est, Xuxa a migrée avec sa famille à l’adolescence pour un grande ville. L’image atypique d’une blonde aux yeux bleus est légitimée par la location géographique de la ville d’origine de Xuxa. Le Sud du pays est riche et le majorité de habitants sont d’origines européennes (allemande et hollandaise), tandis que le Nord est pauvre et la population de descendances africaines. Tout comme pour le rêve américain, le mythe d’origine de Xuxa se base sur le fait que n’importe qui peut commencer sans un sous en poche et devenir riche et célèbre. La chance et la destinée (Simpson, 1993) sont présentées comme des concepts clés pour le succès, dans le même esprit que la loterie.
Les médias de masse, en particulier les médias électroniques suivent, dans la majeure partie du monde, les modèles nord-américains et européens et transmettent en grande partie un contenu métropolitain; l’iconographie de genre représente une part importante de ce qui est véhiculé. Un exemple frappant est la représentation d’une iconographie nord-américaine de la féminité; ‘Xuxa’, le superstar blonde de la télévision brésilienne (Simpson, 1993). Les divertissements populaires font circuler une iconographie du genre stéréotypée, délibérément élaborée dans un but commercial (Connell, 2000 :206).

Le ‘Xou da Xuxa’, est présenté depuis juillet 1986 sur les ondes de la TV Globo au Brésil. Il est diffusé dans seize pays d’Amérique Latine et en version espagnol aux États-Unis et depuis 1993 en anglais. Tout comme Barbie, Xuxa était mannequin de mode et projette une image d’une femme sexy, provocante avec un air enfantin et innocent. Comme le souligne Simpson (1993 :9)
The ideals Barbie and Xuxa project, of course, are so far beyond reach that the fundamental lesson learned is about not measuring up. Barbie and Xuxa icons that play on and feed back social definition of feminine beauty and perfection. Through television’s relentless marketing, Barbie became ‘the most popular toy in history’, and Xuxa emerged as Brazil’s ‘Queen of kids’.

De façon générale, les clones de Barbie Mattel ont été conçus en réponse à des attaques de la part d’association de consommateurs, de féministes et d’enfants aux États-Unis. Les Barbies ‘ethniques’ africaine-américaines, asiatiques renforcent le fait qu’être blanc est la normalité. Barbie est une femme libre, de carrière, indépendante. Barbie écologique, la compagnie Mattel reprend les vieilles poupées, les revitalisent et les envoient dans les pays du sud pour les enfants ‘pauvres’. De la même façon, Xuxa a fait disparaître toute idée raciste liée à son image en mariant Pelé, un joueur de soccer noir. Xuxa a une conscience écologique, le logo ‘Une Nouvelle Planète’ était imprimé sur un chandail qu’elle portait pour une série de photos pour la revue brésilienne Manchete. Les clones de Xuxa sont par contre plus problématiques. Les Paquitas sont une création de Xuxa et apparaissent dans le Xou, dans les films, dans les textes des chansons et dans les spectacles de la Star. Les Paquitas sont des jeunes filles entre quatorze et vingt ans qui ressemblent à Xuxa, qui s’habillent comme Xuxa, reprennent ses poses, ses mimiques faciales, sa façon de parler, marcher. À l’intérieur du programme, les Paquitas aident Xuxa à présenter l’émission. Les chanteurs invités, lors de leur performance sont entourés des Paquitas, dansant lascivement et caressant ces derniers. Les vêtements de la collection de Xuxa sont des reproductions des vêtements qu’elle porte pour les enfants et adolescentes. Ce qui est frappant au Brésil, c’est de voir des jeunes filles de treize ans habillées comme des femmes de trente ans. L’érotisation des enfants y est très clair.
Another tactic Xuxa has adopted to try to naturalize the eroticism on the ‘Xou’ is to draw on Brazil’s international image as a popular destination on the sexual tourism circuit. In an interview on ‘Entertainment Tonight’, Xuxa explained that, if the ‘Xou’ seemed ‘sensual’, that couldn’t be helped, since that’s the way Brazilian women are (Simpson, 1993:140).

Les clones de Xuxa sont le rêve de plusieurs jeunes brésiliennes et latino-américaines. Xuxa est aussi propriétaire d’une école de mannequins, elle surveille le régime alimentaire, les exercices, les cheveux, la manucure et les vêtements portés par les Paquitas. Comme Susan Bordo (1993) le suggère, le refus de manger, perdre du poids, le sport compulsif et la tolérance à la fatigue physique et à la douleur sont devenus des métaphores culturelles pour l’auto-détermination, la volonté et un moral à toute épreuve. Le modèle de beauté et de perfection relève d’un esthétisme blanc occidental et d’un culte à la jeunesse et la minceur. Xuxa, comme Madonna sont aussi considérées comme des femmes qui ont réussi dans le monde des affaires. Si au début, elles ont été exploitées par leur gérant, à partir du moment où elles ont commencé à travailler fort et prendre en main leur carrière, elles ont commencé à rouler sur l’or. Les films de Xuxa attirent des foules, son nom et marque de commerce se retrouve sur des bicyclettes, des planches de Surf, des jouets, treize poupées Xuxa, un magasine mensuel avec un tirage de 700 000 exemplaires, des vêtements, des souliers, du shampoing, des bijoux, des cosmétiques, des fournitures scolaires, de la soupe, du yaourt et des biscuits. Pour être riche et célèbre, il faut être blonde aux yeux bleus, mince, jeune ou faire jeune pour plaire aux hommes et se tailler une place dans leur monde. À la limite entre la prostituée et la madone.
Bordo traces this female corporeal vulnerability not to anatomical differences between males and females, but to cultural forces themselves, forces which have defined women (and, more specifically, thin women) as the object of masculine desire (1993:143).

Le but est clair, Xuxa n’est pas là pour plaire aux enfants mais pour plaire aux papas, être à l’image de leur fantaisie. Donc pour les jeunes filles, il faut apprendre à danser, chanter et s’habiller comme Xuxa pour plaire à papa et devenir une femme parfaite et pour les garçons, aimer Xuxa c’est être comme papa. Maman n’a plus qu’à prendre rendez-vous chez un chirurgien esthétique. Lorsqu’une femme de trente-sept ans, après une liposuccion affirme qu’elle n’a pas encore le corps de Xuxa mais qu’elle est plus belle qu’auparavant. Lorsqu’une femme aux Etats-Unis gagne le concours de la réplique humaine de Barbie et se dit belle, ambitieuse, intelligente, consciente des problèmes mondiaux et environnementaux, l’influence des médias de masse, des campagnes de publicité de Mattel ne sont plus à prouver. Comme Drucilla Cornell l’observe :
To reduce someone to objectified fantasies imposed upon them by someone else’s imaginary is to deny that person their own imaginary and thus denies that they should be the ultimate source of the interpretations and reincarnations of their own sexuality (Cornell, 1995:207).

En entrevue avec Marcia Pereira au début des années 90, Xuxa affirmait que pour rester jeune, elle prévoyait se rendre souvent à la clinique de ‘Tio’ Pitanguy (le chirurgien esthétique le plus populaire du Brésil). En 2001, Xuxa apparaissait sur les pages couvertures de magasines de beauté avec une toute nouvelle prothèse mammaire. Un an plutôt, l’actrice Vera Fisher faisait la couverture de la revue Play Boy Brésil avec le titre suivant : Est-ce la dernière apparition de Vera? À la fin de la quarantaine, Vera Fisher présentait au public masculin sa toute nouvelle prothèse mammaire. Un chirurgien esthétique de Rio de Janeiro soulignait que ‘depuis que ces artistes font la propagande de prothèse mammaire plus grosse que dans le passé, à l’image du modèle américain, les clientes font la demande de prothèses plus grosses’. Pour ce chirurgien le problème majeur avec cette demande se retrouverait dans la loi de la gravité. Avec le temps, le poids de la prothèse étire la peau et augmente encore plus la grosseur du sein. De plus les clientes ne veulent pas se retrouver avec des cicatrices trop apparentes. Tenter d’installer une grosse prothèse par une petite incision a comme conséquences de faire retourner la membrane ou la faire exploser. Les clientes de ce chirurgien carioca sont en majorité des jeunes femmes qui n’ont pas de gros seins. Pour lui, l’explication est la suivante : ‘dans un pays où il y a beaucoup de plages, les femmes accordent plus d’importance à leur apparence’. Pour plusieurs informatrices cariocas, il est toujours plus difficile de répondre aux pressions sociales de la représentation du corps féminin. La représentation du corps féminin véhiculée par les médias de masse impliquerait un travail de conditionnement physique quotidien, une diète sévère et le recours à la chirurgie esthétique. Pour les femmes en général, cet idéal de beauté est tout simplement inatteignable. Pour Rosa, une professionnelle de trente ans qui travaille en multimédia, les femmes sont conscientes de la distorsion entre le corps féminin idéal et la réalité. Cependant, les pressions sociales sont telles que d’une façon ou d’une autre, l’apparence occupe une place primordiale dans les préoccupations quotidiennes.
The stress on physical appearance was part of the modern Brazilian identity. This could easily link to a fluidity between genders and appearances. The development in the twentieth century of the fondness for beaches provided opportunities for display (Higgs, 1999:155).

Comme il est possible de payer sur plusieurs mois l’achat d’une prothèse mammaire, il est facile d’en offrir une pour l’anniversaire des 15 ans de sa fille, sans se ruiner. Cette forme de paiement fragmenté explique le nombre croissant de clientes de toutes classes sociales ou presque. Le prix de vente des prothèses mammaires au Brésil est de
1,300R à 1,900R. La prothèse américaine coûte entre 800$ et 1000$. Le coût moyen de la chirurgie est de 4000R et entre 800 et 1000R de frais hospitaliers. Une seule entreprise au Brésil produit des prothèses mammaires, la Silimédica, les prothèses sont donc importées des États-Unis.
Scenario;
A woman wants to augment her breasts, she goes to her doctor (man), asks to augment her breasts, and relies on manufacturers (men) to provide safe and effective products. If she is unsatisfied with her information or the product she receives, she can ultimately turn to the government (men) for protection against fraudulent products or to the courts (men) for redress. She is the true physical and social embodiment of the Other; her safety is dependent on the decisions of the men involved. She is socially and physically transformed in the process and is spit out in the end as a reconstituted Other (silicone breast debacle, 1997:195).

Depuis les années 70 aux États-Unis, deux producteurs de prothèses mammaires ont dû déclarer faillite suite à des procès parfois étalés sur quinze ans, parce que les prothèses vendues avaient causé des problèmes de santé à des milliers de clientes. A.H. Robins Company déclarait une faillite de 17 millions en 1985 après des poursuites à répétition de clientes et dix plus tard Dow Corning Company répétait la même stratégie de sauvetage. Selon le chirurgien carioca dont la thèse doctorale portait sur les prothèses mammaires,

le problème aux États-Unis était que les chirurgien installait une prothèse trop grande pour la grosseur de l’incision et les prothèses se retournaient au moment de l’installation. Le gel contenu à l’intérieur de la prothèse commençait à migrer vers les ganglions, ce qui causait des infections. Une fois que la prothèse est installée, il n’y a pas de façon de voir ce qui se passe. La capsule formée par l’organisme pour recouvrir la prothèse se forme de deux à trois semaines après l’installation de la prothèse. Alors, s’il y a écoulement du gel pendant ces deux à trois semaines, inévitablement, il y a infection. De plus, l’eau de l’organisme avec le temps fragmente la membrane entourant la prothèse, qui passe de l’état rigide à gélatineux (Luis Pereira, 2001).

Il est donc conseillé aujourd’hui de changer la prothèse à tous les dix ans. Beaucoup de femmes ont dû payer de leur santé avant que ce savoir ne soit décimé.

Susan Caulfield and Nancy Wonders (1993) propose a theory of organizational crime as political crime when the government allows crime by institutions to occur.

We argue that the state engages in political crime when it fails to define widespread and systematic harm against women as illegal, when it neglects to enforce laws that do provide some measure of protection to women, and when it provides structural support for institutional practices which clearly harm women (Caulfield & Wonders, 1993:79).

Crime against women, particularly narcissistic, consenting women seeking a body ideal, are not a high priority according to the government. As men control the capitalistic structures of business, medicine, advertising, and government, female identity is shaped by men. If men desire the big-breasted female ideal, then that image is passed on to the consumers-women. Allowing women to be used in experiments and to suffer from their voluntary implant decision reinforces the hegemony of masculinity, which dismisses female’s concerns and belittles their pain and suffering (silicone breast implant debacle, 1997:193).

Ayna, une assistante chirurgienne, affirme que la majorité des clientes qui désirent une prothèse mammaire au Brésil, ne sont pas satisfaites de leur corps, ne se sentent pas attrayantes. Pour Ayna, il est clair que cet inconfort est lié à la représentation du corps féminin par les médias de masse et l’accessibilité présente de la chirurgie esthétique. Selon cette informatrice, en optant pour la chirurgie, les femmes ont tendances à avoir une plus grande estime de soi par la suite et se sentent plus attirantes. La plasticité, l’introduction d’un corps étranger ne semblent pas être ressentis comme une menace pour la santé des clientes. L’insatisfaction de ne pas avoir une poitrine qui correspond aux standards de beauté est suffisamment grande pour devenir la raison première pour modifier cet état de fait. Dans le passé, les femmes qui prenaient la décision d’obtenir une prothèse mammaire avaient tendances à cacher la plasticité de leur poitrine, du fait que peu de femmes optaient pour ce choix à des fins esthétiques. Aujourd’hui, l’utilisation des prothèses est répandue et la transformation du corps, pour répondre aux standards de beauté, est suffisant pour assumer et parler ouvertement du changement.


Construction sociale de l’imagerie homosexuelle
Le culte de la jeunesse et de la beauté au Brésil et la propension d’individus s’appliquant à transformer leur corps pour arriver le plus près possible des idéaux de beauté diffusés par les médias de masse et électronique est non seulement liée à l’influence occidentale mais aussi localement à l’instabilité politique, économique et sociale. Le futur étant de toute façon incertain, mieux vaut obtenir sur le champs ce que l’on désire. Si l’image de la femme est une création de l’imagination patriarcale, il n’en va pas autrement de l’image de l’homosexuel. Les raisons de cette construction sociale de la représentation du corps masculin homosexuel sont en partie en réaction avec l’image du corps au stade terminal du sidatique.
Les masculinités ne sont pas des manières d’être simples et homogènes. Une recherche approfondie sur les masculinités permet par exemple, dans l’étude de Klein (1993) sur les bodybuilders, entre la définition hétérosexuelle de la masculinité hégémonique et la pratique homosexuelle, grâce à laquelle certains d’entre eux financent le façonnage d’un corps exemplaire (Connell, 2000 :199).

Depuis le milieu des années 80 au Brésil, plusieurs homosexuels se sont mis au bodybuilding dans le but de projeter une image de santé. Le mouvement a commencé à Rio de Janeiro, où le culte du corps était déjà bien établi. Ce mouvement, a été influencé, en partie, par la popularité du bodybuilding à l’intérieur des sous-cultures gay de Miami et San Francisco aux Etats-Unis. Montrer à tous, un corps viril, bronzé, en santé pour contrer toute association avec les images du corps épidémique.
Only AIDS, in our population’s discussions, was seen as displaying a shared set of specific and unmistakable symptoms: blemishes, hair loss, and acute thinness. It would seem that the notion of a ‘healthy carrier’ –that is, someone who neither looks nor feels ill and yet has and can transmit the virus- is difficult to conceptualise (Gogna & Ramos, 2000:123).

Au Brésil, on surnomme les hommes homosexuels musclés ‘Barbies’, impliquant littéralement la poupée Barbie et utilisée pour décrire l’exagération consciente de la construction du corps masculin, manufacturé à l’aide des longues heures passées à l’académie à lever des poids et faire de l’aérobie.
Nowhere over the past two decades has the history of homosexuality evolved entirely separate from the HIV/AIDS epidemic; while complex and diverse gay communities existed previously in the Anglo-European world, in many parts of the developing world the emergence of gay identities and communities has been largely contemporaneous with the emergence and evolution of AIDS (Parker, Barbosa, Aggleton, 2000:12).

Selon Terto (2000), les images présentées par les médias de masse, surtout au début de l’épidémie, semblaient vouloir transformer l’homosexualité en un spectacle morbide. La santé et la mort sont deux mots qui guident les plaisirs homosexuels. Les changements au niveau de la représentation de l’identité gay dans les grandes villes du sud ont été largement influencés par les homosexualités occidentales, par la les films, la musique, le tourisme, la mode et les médias de masse homosexuels.
Homosexuals not only became more visible as they conquered new spaces, they achieved greater social and economic status as ‘demanding’ consumers with ‘good purchasing power’ who deserved networks of specialized services such as travel agencies, hotels, clinics, and so on. There were no longer only ‘crazy queers’ exotic and obligatory characters in samba ‘schools’ (groups organized for Carnival parades), or travestis who appeared in places of prostitution and the crime reports of the sensational press; rather, new and elaborated cultural representations of male homosexuality appeared- through an interplay of activists, political groups, books, academic theses, favorable municipal laws, and artistic expression, all shedding light on life styles and possibilities of ‘being homosexual’ far from the realms of the exotic, the forbidden, the ‘ill’. Such changes were decisive for the next generation of male homosexuals, who, in spite of the advent of AIDS and related intensification of prejudice, continued to participate in the growing gay (sub)culture and to create new representations of homosexuality in Brazilian society (Parker, 1999).

La nouvelle donne de la technoculture implique une nouvelle perception du corps et du processus de transformation du corps. Une nouvelle contradiction s’ajoute. Les homosexuels ont voulu s’éloignés le plus possible de l’image du corps épidémique. Les travestis prostitués gagnent bien leur vie si leur corps est vierge de cicatrices et de traces de toutes maladies. Cette aseptisation de l’image du corps, de sa présentation esthétique va de pair avec des moyens pour y arriver de plus en plus technologiques et loin du circuit légal.
The aesthetics of fashion are informed by the modernity of urbanism and consumerism (and subsequently by postmodernity). Fashion plays off the preoccupations, contradictions, and taboos of western culture. Several other elements are also invoked in definitions of fashion: individuality, Judeo-Christian morality, gender identity and imperialism. According to Wilson (1985:15), fashion is a flexible means of expressing the ambiguity of capitalism, identity and art, thereby becoming ‘modernist irony’ (Craik, 1994:7).

Le corps à la même importance que les vêtements qui le couvre. Si les hommes aiment les grosses fesses, les travestis se font injecter de la silicone dans le bas du corps. Si les hommes aiment les gros seins, les femmes et les travestis se font installer une prothèse mammaire. Dans le cas des Barbies, le processus de transformation du corps impliquait un travail quotidien à l’académie, pendant de longs mois et de façon soutenue pour une bonne partie de la vie. Aujourd’hui, il est possible de se faire installer des prothèses pectorales, pour les cuisses, les biceps, les abdominaux, les fesses et le pénis. Pour environs, 15 000$, il est possible d’avoir le corps d’Arnold sans mettre le pied à l’académie de musculation. Pour les individus préférant les poudres, pilules et injections, il est possible d’avoir un corps avec des muscles saillants en quatorze jours. Ces substances illicites en Amérique du Nord et en Europe, le sont aussi au Brésil mais il semble qu’il soit possible de s’en procurer dans toutes les académies.
Bodies themselves, in their materialities, are never self-present, given things, immediate, certain self-evidences because embodiment, corporeality, insist on alterity, both that alterity they carry within themselves (the heart of the psyche lies in the body; the body’s principles of functioning are psychological and cultural) and that alterity that gives them their own concreteness and specificity (the alterities constituting race, sex, sexualities, ethnic and cultural specificities). Alterity is the very possibility and process of embodiment: it conditions but is also a product of the pliability or plasticity of bodies which makes them other than themselves, other than their ‘nature’, their functions and identities (Grosz, 1994:209).

Les représentations des corps sont de plus en plus éloignées de la réalité et de la diversité du corps humain original. Cet état de fait, souvent critiqué, a aussi fait place à la possibilité de transformation, de négation et de reformulation des corps. Si de façon générale, ces modifications répondent aux demandes de la société dominante, il demeure que les possibilités de subversion sont grandes. On parle aujourd’hui des sexualités, des identités. La condition humaine dite ontologique a définitivement fait place à la construction, à la création de corps dont la trajectoire n’est plus dictée par le sexe biologique.

La production du corps travesti
De nouveaux qualificatifs seront probablement ajoutés à celui de Barbie : ‘natural o original’ ou ‘bombada’, ‘la naturelle ou l’original’ ou ‘gonflée’. Au niveau de la prostitution, les travestis connaissent la même idéalisation du corps que celui de la femme. Leurs clients sont en majorité des hommes mariés. Selon Mathieu (2000) les hommes sont soumis à une contrainte spécifique que les touche davantage que leurs collègues féminines : l’âge. Dans la prostitution masculine, la jeunesse est un capital, mais dont la rentabilité s’érode vite. De fait, il semble que le culte de la jeunesse soit encore plus en vogue au Brésil qu’en Europe. Par contre pour aller travailler en Europe, le travesti doit être ‘produite’, c’est-à-dire être passer par le processus de chirurgie esthétique. Une ‘bombadeira’ avec vingt ans d’expériences de production de corps travestis me racontait que
pour gagner de l’argent, le travesti se prostitue. Pour se prostituer le travesti a besoin d’un corps. Un corps produit. Pour attirer l’attention du client. Pour se sentir mieux avec soi-même. Ce n’est pas supportable de sortir dans la rue avec des seins faits de torchons. La honte, d’enlever ses vêtements et de perdre toutes ses plumes. Le travesti ne peut pas supporter cela. Alors, elle modifie son corps pour se sentir mieux et donner le meilleur au client. Avoir une prothèse mammaire, c’est le certificat leur permettant de gagner leur vie. Pour arriver à s’acheter une voiture, un appartement, c’est petites choses. Il faut faire appel à un chirurgien. Plus le corps est bien produit, le mieux il gagne sa vie (Mona, 2001).

Et il n’y a pas de fin à l’amélioration de la production du corps. Toujours des retouches à faire. Tout comme l’exemplifiait Renata, une amie travestie de Fortaleza : ‘le processus plastique par lequel nous passons ressemble à celui d’assemblage dans une usine. Nous nous produisons pour être compétitives sur le marché, avoir les plus beaux seins, les belles fesses, cuisses et lèvres, nous sommes des produits de consommation et nous avons très peu de temps pour en profiter’. Les travestis ont construit une hiérarchie interne basée sur la production du corps, des départs en Europe et de l’identité féminine. À ce qui à trait à l’identité, la façon de marcher, s’asseoir, les gestes, la façon de parler, de se comporter en société sont considérés comme des éléments importants pour juger des chances de réussites du travesti-en-devenir.
Malgré tous les éléments d’une trajectoire individuelle qui peuvent induire un homme à adopter, plus ou moins durablement ou définitivement, une apparence féminine sur le marché de la prostitution, le poids des schèmes de perception et des dispositions intériorisées au cours d’une socialisation –malgré tout et au moins pour partie- masculine, ou ce que l’on pourrait appeler l’inertie de l’habitus masculin, font que les prostitués hommes partagent avec l’ensemble des autres hommes une position relativement patriarcale dans les rapports sociaux de sexe, jusque et y compris dans cet ancien bastion –ou, mieux, espace de relégation- de la féminité qu’est l’espace de la prostitution (Mathieu, 2000 :105-106).

Le corps des travestis est le métier qu’ils transportent avec eux. Kulick (1998) s’est intéressé à la prostitution travestie à Salvador de Bahia et ses informateurs lui racontaient qu’ils retiraient beaucoup de plaisir à se prostituer, qu’ils rencontraient des gens de partout, qu’ils pouvaient prendre la position active à l’intérieur de la relation sexuelle etc. Le corps des travestis est d’abord construit pour répondre au besoin de se dissocier de l’identité de genre masculine, à un besoin également narcissique de beauté pour rehausser l’estime de soi et se sentir plus féminine comme le bodybuilder plus virile. Le travesti a besoin d’un beau corps pour gagner sa vie. Le milieu de vie du travesti est la nuit, les quartiers du centre des grandes villes, il est un acteur facile à trouver lorsqu’on sait ce que l’on cherche. Il fait affaire avec toutes les classes sociales de la société. Comme Dyens (2000) le souligne, le corps n’est plus ‘moi’, il devient véhicule de survie, vecteur, palimpeste, ruche, système de colonie. Sans son corps, le travesti n’a pas de sens. C’est d’abord par son corps qu’il accoste les hommes en voiture aux coins de rue des grandes avenues. Son corps parle de l’érotisme de l’être humain, de sa sexualité, de ses désirs tout genre confondu.

Mona est considérée comme la bombadeira qui produit les plus beaux corps à Sao Paulo. La bombadeira est la personne, en général travesti, qui injecte le silicone liquide dans le corps des travestis. Cette silicone est d’origine industrielle et hautement toxique. Les bombadeiras se procurent des gallons de silicone industrielle illégalement dans des industries automobiles et autres industries qui utilisent la silicone dans la fabrication de produits de consommation. Pour le chirurgien esthétique carioca, cette pratique est criminelle et devrait être passible d’emprisonnement. Par contre, comme l’affirme Marco, un psychologue qui travaille avec un groupe de travestis à Sao Paulo, la chasse aux bombadeiras, ne fait qu’empirer le problème. L’arrestation de bombadeiras ‘professionnelles’ n’enraye pas la demande et a comme conséquence que des travestis sans expériences s’improvisent comme tel.

De façon générale, les travestis sont les premiers à reconnaître qu’ils sont loucas ‘folles’ par rapport à la transformation de leur corps. Folles dans le sens où, ils ne pensent pas à deux fois avant de modifier leur corps. Comme la femme insatisfaite de l’esthétique de sa poitrine, le travesti doit s’investir dans plusieurs modifications corporelles esthétiques. Le travesti en début de carrière prend des hormones féminines pour arrondir les contours de son corps et obtenir une petite poitrine. Dans la rue, ces travestis sentent rapidement le besoin d’opter pour la silicone dans le but d’être compétitifs avec les autres travestis produits. Une travestie de Fortaleza de dix-neuf ans, Dayane, m’a un jour demandé si je pouvais lui injecter de la silicone industrielle. Malgré des recommandations objectives sur les dangers de la silicone industrielle, Dayane semblait loin de partager mes craintes. Pour elle, la décision était prise. Pendant plusieurs semaines, Dayane était disparue de la circulation. Impossible de la rencontrer dans le rue, ni a la discothèque qu’elle fréquentait le week end. En me renseignant auprès de travestis qui la connaissaient, ces dernières m’apprirent que Dayane s’était fait injecter de la silicone dans les jambes et qu’il y avait eu des complications faisant en sorte qu’elle ne pouvait pas marcher. Le résultat d’une infection qui s’était manifestée par de la fièvre et des plaques noires sur les jambes. Était-il possible de retirer la silicone? Oui, c’est possible de tenter de drainer dans certain cas mais Dayane n’avait pas travaillée pendant des mois pour rien.

Malgré, l’affirmation de Mona qu’elle utilisait de la silicone esthétique et non industrielle, cette remarque demeure très peu plausible, du fait qu’une seule industrie au Brésil produit des prothèses mammaires. Mona conseille les travestis qui viennent lui demander ses services de bombadeira. À la fin des années 1970, jusqu’à la fin des années 1980, les travestis se faisaient injecter parfois plus de dix litres de silicone industrielle. Mona explique cette tendance de la façon suivante :
Lorsque les bombadeiras sont apparues, l’idéal de beauté se trouvait dans la partie inférieure du corps. Les travestis voulaient se rapprocher le plus possible de cet idéal en ayant des hanches et des fesses énormes. Les travestis de cette époque aimeraient retirer la silicone aujourd’hui parce qu’elles sentent qu’elles ressemblent plus à des caricatures qu’à des femmes. Aujourd’hui, l’idéal de beauté ne demande plus une si grande quantité de silicone. Je ne conseille à personne d’injecter plus de trois litres de silicone. Mais les travestis sont ‘folles’ et il n’est pas toujours possible de les ‘raisonner’.

La silicone industrielle est liquide. Malgré, la certitude de Mona que la silicone demeure en place entre les os et les muscles, la tendance est plutôt qu’à un moment où un autre le fluide descendra le long de la jambe. Jusqu’au milieu des années 1990, la majorité des travestis se faisaient injecter de la silicone industrielle au niveau de la poitrine. Plusieurs se retrouvaient dans la même situation que Claudia, deux litres de silicone dans le ventre. La silicone avait été appliquée un peu plus haut que la poitrine mais pour une raison que Mona ne peut expliquer, le liquide n’est pas resté à sa place. Claudia a une poitrine vide et la silicone ne peut pas être drainée parce qu’elle touche à plusieurs organes rendant l’opération impossible. Malgré cela, Claudia travaille dans le but de se faire installer une prothèse mammaire.

Le corps se plastifie, se commercialise et devient culture parce que la technoculture n’a cessé de le morceler, l’ayant fait passer, en l’espace d’à peine un siècle, d’une structure fermée et solide à une architecture liquide et transparente, là où les frontières glissent continuellement les unes dans les autres, là où les absolus disparaissent, là où il n’est plus possible de parler d’ontologie. La postmodernité nous montre que s’il n’y a plus de corps organiques dans lesquels celle-ci peut exister (Dyens, 2000 : 134).

Le corps du travesti a très peu à voir avec la biologie. La culture désuète qui l’entoure tente de le lui rappeler, de l’empêcher de fuir en lui rappelant qu’il est né avec un pénis et qu’il appartient au sexe masculin. Le travesti en parle, l’avoue, le vomi mais ajoute que rien n’est fixe, tout peut être modifié dans la vie. Il y a des individus, comme le disait Denise, ‘qui naissent femme ou homme et qui vont vivre comme ça toute leur vie. Il y en a d’autres que non. Ce qui importe, c’est la tête’. Cependant, la société patriarcale a plutôt tendance à miser sur la biologie, la physiologie pour affirmer que tel individu est une femme et que tel autre un homme. Devant, le travesti, elle hésite, -je ne parle même pas de la plupart des personnes qui considèrent le travestisme comme une perversion, une disfonction sexuelle -elle hésite parce que la base du travesti n’est plus vraiment biologique, tout ce passe dans la tête, le corps en est le produit et non l’inverse.
Qu’est-ce qu’un corps devenu plastique ? Un corps devenu plastique est un corps qui se détache de sa biologie. Il est un corps qui existe, du moins en partie, à l’extérieur du monde biologique et qui dépend de moins en moins des écosystèmes organiques. Un corps devenu plastique est un corps-univers, un corps qui se crée ses propres systèmes physiologiques, psychologiques et génétiques. Le clone, par exemple, est un corps devenu plastique, car il n’existe pas dans le monde biologique. Le clone appartient au monde des idées, des concepts et de la culture (Dyens, 2000 : 101-102).

Le travesti s’est construit un corps en devenir plastique, une identité, en devenir nomade. Il n’a pas d’adresse fixe. Il est libre arbitre de sa vie, de son corps et de son identité. Le travesti transporte avec elle\lui son avoir essentiel, son corps, partout où il se rend. Partout sur son passage, il\elle représente la déconstruction de l’idée du genre. Elle\il suit l’économie transnationale postmoderne. Le travesti en devenir part du Nordeste comme matière première, arrive dans les grandes raffineries du Sud du pays, Rio de Janeiro, São Paulo et part en produit fini, prêt à être commercialisé en Europe où l’on exige une qualité de contrôle impeccable. Le travesti en est conscient et s'en joue. La quête identitaire du travesti est comme le souligne Schwartzwald (1998), complémentaire de la mondialisation des rapports économiques. Il\elle est le premier à y gagner. Son corps lui a coûté cher et le travesti doit se dépêcher de rembourser le prêteur parce que les intérêts courent à un taux et une vitesse folle, tout comme les années de sa vie. Des maques du Sud leurs ont prêté de l’argent comme la banque en prête pour acheter une maison. C’est une forme de commerce comme une autre et les deux parties savent très bien les coûts et bénéfices de l’entreprise. Quand le corps subit des transformations, ‘naturelles’ ou ‘artificielles’, alors sa relation avec l’environnement s’altère, c’est qu’il n’existe plus tout à fait de la même façon dans le monde qui l’entoure (Dyens, 2000 : 98).

La société patriarcale et la sous-culture travestie pousse ses acteurs à être en mouvement constant : ils ne peuvent que compter sur eux-mêmes. Jusqu’à maintenant, leur environnement n’est pas des plus sécuritaires et les travestis font preuve de peu de solidarité entre eux. Les ‘hommes’ viennent parfois comme client, parfois comme assassin. Les femmes sont curieuses, suspicieuses et ouvrent rarement leur porte aux travestis. La révolution corporelle du XXe siècle ne s’est pas faite sans heurts. Le corps-culture, le corps plastique est aussi, bien souvent, le corps-douleur. La plasticité des corps, si elle est un enfantement, est aussi, tout à la fois, un avortement (Dyens, 2000 : 112-113). Le passage d’un état d’être à un autre en peu de temps.
Une chose paraît sûre : nous vivons aujourd’hui une de ces époques charnières où tout l’ordre ancien des représentations et des savoirs bascule pour faire place à des imaginaires, à des modes de connaissances et à des styles de régulations sociales encore mal stabilisé. Nous vivons un de ces rares moments où, à partir d’une nouvelle configuration technique, c’est-à-dire d’un nouveau rapport au cosmos, s’invente un style d’humanité (Lévy, 1990 : 18).

En 2001, cette époque charnière dont parle Lévy est loin d’être partagée par la majorité. Le changement semble faire peur, les individus s’enferment dans des visions conservatrices désuètes, vision d’un monde bipolaire qui ne peut pourtant plus tenir en place. Si les travestis sont en partie contemporains du changement de représentations, de régulations sociales, ils se battent avec une société patriarcale qui tente de séparer ce qu’eux\elles considèrent comme un\une, le masculin et féminin. Une sous-culture tenante de la technoculture, nous présente la déconstruction de l’identité de genre, une façon efficace de lutter contre la société hégémonique.

Pour survivre dans son environnement, le travesti doit faire preuve de dextérité à plusieurs niveaux et comme l’affirmait Renata : ‘le travesti sait tout. Mets un travesti dans la cuisine, il pourra cuisiner. Mets un travesti dans une plantation de café et il peut se débrouiller. Il peut performer les tâches masculines comme les tâches féminines’. La vie d’un travesti est bien remplie. Nous sommes tous conscients des difficultés de la vie de prostitution dans une grande ville au Brésil mais à un moment, il faut voir d’autres facettes, des dimensions beaucoup plus riches que l’accablement sur la marginalisation de ces individus. Peu d’individus ont une force de caractère suffisante pour résister au moule identitaire de genre. Ceux\celles qui résistent le font souvent avec des conséquences ; la perte du soutien affectif familiale, d’un réseau social et de l’accès à l’éducation. En quittant les lieux de tortures identitaires, le travesti se retrouve finalement avec lui-même, avec un monde intérieur en ébullition, en attente d’être construit, transformé, créé. Enfin à l’écoute de lui-même, son territoire est à définir.
Un corps sans territoire est un corps en exil qui a le mal de lui-même, le mal de son ontologie. Un corps sans territoire est un corps instable qui tente, à la fois, de nier et d’affirmer sa biologie. Plusieurs exemples contemporains (culturisme, implants divers, bodypiercing, etc.) nous montrent d’ailleurs des corps qui hésitent entre la transparence et la solidification, entre la culture et la biologie. Tous ces corps illustrent la perplexité et l’indécision ontologiques propres à notre état actuel. Nous vivons le devenir culturel de nos corps. Nous vivons, biologiquement et idéologiquement, les instabilités et les possibilités de nos corps (Dyens, 2000 : 100).

Pour Dyens, l’instabilité est négative, mais inévitable puisque le mouvement, la non-fixité n’alloue pas de stabilité. Le travesti est un nomade identitaire à la fine pointe de la technologie. Ses déplacements suivent le rythme de la production de son corps, de l’importance de respecter la route qu’il\elle s’est tracé. Pour se rendre à São Paulo, pour conquérir l’Europe. Revenir chez-lui\elle et de nouveau être appelé par le mouvement. Pour parfaire son corps ou pour sa propre survie. À Sao Paulo, le discours par rapport au départ pour l’Europe est le suivant : le travesti doit posséder un corps complètement produit avant d’envisager de partir. Les travestis qui réussissent en Europe sont ceux qui sont les mieux produites et les plus belles. Il semble que la réalité soit autre mais il demeure que la pression est grande. Une cafetina n’offrira pas son aide financière à un travesti qui n’a pas de prothèse mammaire, les risques de perte de l’investissement sont trop élevés. De façon contradictoire, Mona me confirmait ce discours et affirmait que les travestis, lorsqu’ils ne meurent pas avant, vont vieillir en Europe.
Tu ne vois pas de travestis vieux au Brésil parce que les Brésiliens aiment seulement la nouveauté et cela pour tout produit. Trente ans pour un travesti, c’est déjà vieux au Brésil. C’est plus facile de continuer à gagner sa vie en allant en Europe. Les Européens sont moins obsédés par la nouveauté. (Mona)

Le départ de travestis pour l’Europe suit le mouvement métropolitain. Les citadins quittent la ville pendant les vacances estivales et restent en famille pendant les fêtes. Le travesti brésilien qui travaille dans le Nord de l’Italie quitte le Brésil à la fin du mois de mars. Le temps des fêtes passé, les clients recommencent à avoir un pouvoir d’achat. Le travesti retourne au Brésil à la fin du mois de juin et repart pour l’Europe à la rentrée des classes au mois de septembre. Les travestis ‘européens’ reviennent au Brésil avec des produits ‘européens’ dans le but de les vendre à d’autres travestis. Les travestis qui n’ont pas encore eu la chance de s’envoler pour l’Europe sont friands de produits européens. De façon générale, ils croient que la qualité des produits est meilleure et originale, c’est-à-dire impossible de retrouver les mêmes produits au Brésil. Les travestis rencontrés revenaient de l’Italie et ramenaient avec eux, des bikinis, des perruques, du maquillage, des parfums, des hormones, des vêtements et des souliers. Les travestis brésiliens qui ne sont jamais allés en Europe sont particulièrement acheteurs de perruques. Il semble que la qualité du cheveu ne soit pas comparable avec les perruques faites au Brésil. Les modèles de talons hauts sont différents et les travestis en général accordent beaucoup d’importance à l’originalité des souliers. À ce qui à trait aux hormones féminines, il semble qu’il soit possible de trouver des hormones en Italie qui conviennent au travesti plus que celles vendues au Brésil. Patricia affirmait que les hormones italiennes avaient moins d’effets secondaires et que les doses de progestérones et estrogènes semblaient avoir été conçu pour les besoins des travestis.

L’idéologie patriarcale transmise aux enfants
Cette trajectoire est remplie par un nombre limité de travestis. Malgré tout le potentiel subversif de leur être, le travesti fait constamment face à un retour et un certain ‘conformisme’ à l’idéal phatasmagorique du féminin. Comme le souligne Connell (2000),
les médias d’informations internationaux sont également contrôlés ou fortement influencés par la métropole, et véhiculent les définitions occidentales d’une masculinité autoritaire, de la criminalité, de la féminité désirable, etc.
Children and their parents are constantly bombarded with cultural messages that establish the boundaries of socially desirable behaviour. Movies, television programs, and advertisements are powerful agents of socialisation. Television commercials, though delivered in small doses, have a substantial cumulative effect (Sobieraj, 1997:15).

Une recherche effectuée aux États-Unis sur les commerciaux télévisés de jouets pour enfants démontrent que de façon générale, selon Sobieraj (1997), the gender imagery in television commercials is relentlessly stereotyped. Boys are strong, independent, athletic, in control of their environments, adventurous, and aggressive. Girls are giggling, gentle, affectionate, fixated on their physical appearance, and extremely well behaved.

La construction sociale du genre est basée sur la différence mais aussi sur la domination. Sur 600 commerciaux télévisés de jouets pour enfants, aucun ne présentait des filles ayant un comportement agressif. On ne s’étonne plus que le vidéo-clip de Madonna (2001) racontant l’histoire d’une Bonnie faisant les 100 coups ait été retiré des ondes de la MTV parce que son contenu transgressait les bases de la division de l’identité de genre occidentale. Une des hypothèses de la recherche de Sobieraj (1997) stipulait que les commerciaux de jouet qui présentent seulement des filles incluent des références verbales sur l’attraction physique plus souvent que les commerciaux de jouet présentant seulement des garçons. Cette hypothèse une fois vérifiée impliquait que les références par rapport à l’attraction physique féminine étaient soulignées aussi souvent que les références à la domination comme idéal pour les garçons. Comme Sobieraj (1997) le remarque, la reproduction de l’idéologie patriarcale est souvent considérée comme insidieuse, lorsqu’en fait dans le contexte de la recherche elle était fortement explicite. Lorsqu’un enfant qui écoute la télévision de façon régulière arrive à 17 ans, il/elle aura assisté a environ 350 000 commerciaux (Bretl & Cantor, 1988). Les fabricants et les annonceurs extériorisent lorsqu’ils choisissent de commercialiser un produit d’une manière stéréotypée. Les enfants exposés à ces commerciaux comprennent cette création comme un fait objectif (Sobieraj, 1997).

De la même façon, comme le souligne Simpson (1993) les Brésiliens regardent la télévision plus que tout autre population du tiers monde. C’est le régime culturel de plus de dix millions de jeunes assistant jour après jour à des programmes télévisés de la trempe du ‘Xou da Xuxa’. Le Brésil est en quatrième position pour le nombre de téléviseurs (28 millions), derrière les Etats-Unis (154 millions), le Japon (79 millions), et l’Angleterre (33 millions). Une étude effectuée à Sao Paulo, montre que 95% de la population assiste régulièrement à des programmes télévisés (Simpson, 1993).

What gets communicated to parents about their kids encourages them to reproduce a rather limited range of gender-stereotyped appearances and reinforce a rather limited range of gender-bound behaviours… parents encourage the gender-differentiated play preferences of even very young children (Eiss, 1994:259).

Dans le Sud du pays, un commercial montrait un jeune garçon de sept ans à l’école regardant amoureusement une petite blonde aux yeux bleus du même âge. Le petit garçon ne savait pas comment aborder sa compagne lorsque cette dernière, sans le savoir, lui en donna l’occasion. À la sortie des classes, elle échappa son téléphone cellulaire dans les escaliers. Le garçon l’appèle donc le soir même pour lui dire qu’il a retrouvé son téléphone cellulaire. Le lendemain les nouveaux tourtereaux discutent dans les escaliers de l’école avec le téléphone cellulaire dans les mains. À l’intérieur du commercial, ce qui est souligné, c’est que les enfants sont aussi des consommateurs comme les adultes. Cela, malgré le fait que plus de 70% de la population de travailleurs au Brésil ne gagne pas plus de 250 dollars par mois et 50% de la population sous le seuil de la pauvreté partage seulement 2,5% du revenu national du pays.
The eighties saw what professors Regina Festa and Luiz Fernando Santoro call the development through the media of a ‘vast network of unprecedented social standardisation through which were passed, on a massive scale, information, social values, aesthetic forms, consumer trends, and the systematic and cumulative construction of symbolic modes and social relations (Simpson, 1993: 43-44).


Conclusion
Comme le propose Connell (2000), si nous admettons que les relations internationales, les échanges internationaux et les marchés mondiaux sont, de façon inhérente, une arène de formation du genre et de politique du genre (Enloe, 1990), alors nous pouvons reconnaître l’existence d’un ordre de genre mondial. Il est de plus en plus facile de décrire les modèles utilisés comme idéaux de beauté commerciaux. Cette saturation médiatique de masse nord-américaine et européenne diffuse des images loin de la réalité de la majorité des consommateurs de la planète. Les politiques de genre véhiculées par les médias de masse ont elles, un effet cumulatif ayant comme conséquence l’acceptation de ces politiques comme objectivement factuelles.


La création progressive d’un ordre de genre mondial a entraîné de nombreuses instabilités dans les systèmes de genre locaux. Ces instabilités vont de la perturbation de la dominance culturelle locale des hommes, au fur et à mesure que les femmes ont accès au domaine public et à une meilleure éducation, en passant par la perturbation des identités sexuelles qui a produit la politique queer dans la métropole, aux changements dans l’intelligentsia urbaine qui ont produit ‘le nouvel homme sensible’ et autres images de changement du genre (Connell, 2000).

Ces images sont diffusées localement et leur contenu subversif atteint rarement la culture dominante, si ce n’est qu’en rétroaction médiatique à des fins commerciales. La construction de l’identité de genre ne correspond plus aux réalités métropolitaines. Comme le suggère Foucault (1993), c’est précisément lorsque les images deviennent fixes qu’il faut les détruire avant qu’elles ne détruisent l’imagination elle-même.

Changing the body image, I maintain, must involve changes in the imaginary, which situates the body image within a vast horizon of possible significances. To change the imaginary, we must in turn create new images of the body, dynamic images of non-docile bodies that resist the readily available techniques of corporeal inscription and normalisation that currently define ‘human reality’ (Weiss, 1999:67).

L’idéologie patriarcale doit être comprise comme un schéma imaginaire n’ayant pas plus de fondations objectives que tout autre. À l’intérieur de l’in(corp)oration de la construction sociale de l’identité de genre, l’individu doit reconnaître (Grosz, 1990) que les frontières et les limites imposées sur sa cartographie corporelle sont vraiment des projections sociales – conséquences des désirs, et non pas de la nature.

Les icônes de beauté, les corps, la définition du féminin et du masculin sont des créations de l’idéologie patriarcale. Les véhicules utilisés pour promouvoir ces idées doivent être déconstruits et l’inaccessibilité de leurs images reconnues. De cette façon, il sera peut-être possible de souligner le côté ‘parodique’ de la construction de l’identité de genre dominante. En prenant conscience de la dimension de performance de l’identité de genre, de nouvelles images dynamiques, en mouvement émergent. L’imagerie du corps technologique doit utiliser la transformation à l’intérieur d’une optique de multiplicité et non plus de bipolarité. Il apparaît déplacer de continuer d’insinuer que les enfants doivent être éduqués de façon antagoniste, d’où l’importance de présenter des modèles et idéaux offrant une liberté de choix basée sur sa propre construction identitaire et non pas sur une base renforçant des stéréotypes, des comportements et des qualités impossible à atteindre.

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